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Saint Jean-Baptiste est debout, vu de face, la coupe baptismale dans la main gauche; sa droite relève le large manteau qui couvre son corps amaigri par l'abstinence, de manière à laisser voir entièrement nue sa jambe droite.

Une prairie légèrement ondulée couvre les premiers plans; de gracieuses fabriques, des montagnes découpées à plaisir ferment, à droite, l'horizon limité à gauche par un bouquet d'arbres à l'ombre duquel deux bergers, assis sur l'herbe, gardent en causant un troupeau de moutons.

F

Au haut de la gauche est la signature: SIVLVI CAMPAGNOLA, et au bas de la droite on lit: « Appresso Nicolo Nelli in Venetia. » C'est, croyons-nous, la première adresse qu'un marchand ait mise sur une estampe.

Cette gravure est une copie en contre-partie d'une estampe de Mocetto. Campagnola n'a guère modifié dans la figure que la barbe et la chevelure; et cependant, il n'a rendu ni le caractère imposant, ni la tournure héroïque du dessin de Mantegna si bien traduit par Mocetto. Son procédé est une faute ici; si la gravure au pointillé convient admirablement pour interpréter la couleur et la lumière du Giorgione, elle est impuissante à exprimer les qualités supérieures du Mantegna. Quant au paysage, Giulio l'a entièrement changé, et, malgré le charme extrême avec lequel il a rendu la nature, nous ne pouvons le louer de son innovation. Si le paysage de Mocetto était fait de convention, il avait du moins le mérite de s'harmoniser avec la grandeur austère de la figure, tandis que celui de Giulio est trop gracieux pour un sujet qui ne comportait point la grâce. Nous possédons de ce paysage le dessin persillé par le décalque. Tracé entièrement au bistre, avec la pointe effilée du pinceau, il donne assez bien l'effet délicat et étouffé que produit la gravure au pointillé de Giulio. Il diffère légèrement de l'estampe dans les premiers plans où Campagnola a cru devoir sacrifier quelques touffes d'herbe qu'on retrouve indiquées par des traits d'une finesse miscroscopique. Pour les autres détails relatifs à ce dessin, nous renvoyons le lecteur à ce que nous en avons déjà dit à la page 336.

4

LA PÉNITENCE DE SAINT JEAN CHRYSOSTOME

Hauteur du personnage, 100 mill. Ottley, no 9.

La jeune princesse est assise entièrement nue au milieu de rochers. Elle offre le sein à l'enfant que le crime de saint Jean Chrysostome lui a donné. Dans le fond, à droite, on aperçoit le saint accomplissant la pénitence qu'il s'est imposée. Il se traîne à terre

sur ses genoux et ses mains, n'osant lever vers le ciel ses regards. Au haut de la droite on lit IVLIVS CAMPAGNOLA ANTENOREVS.

C'est à une légende italienne, très-populaire au xve siècle, sous le titre de Historia di san Giovanni Boccadero, que nous devons l'explication de cette composition copiée par Campagnola, d'après Albert Dürer.

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Saturne est assis à terre. Un manteau couvre sa tête, son dos et ses jambes. Il tient des joncs dans sa main gauche, et appuie son bras droit sur une pierre où est écrit: SATVRNVS. Trois troncs d'arbres s'élèvent à droite, sur le second plan, et on aperçoit à gauche, dans le lointain, une ville bàtie sur le bord de la mer. De ce même côté, dans le haut, on lit: IVLIVS CAMPAGNOLA ANTENOREVS F.

Nous n'avons jamais eu l'occasion de voir cette pièce décrite par Bartsch.

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L'aigle de Jupiter dirige son vol vers la gauche, et emporte sur son dos Ganymede effrayé de voir au-dessous de lui la mer, les maisons, les arbres et les collines. Cette estampe est signée au haut de la droite: IVLIVS CAMPAGNOLA.

1er état c'est celui qui est décrit.

2e état au-dessous de son nom, Campagnola s'est qualifié natif de Padoue par le mot ANTENOREVS.

L'élégante tournuré de Ganymède, ses cheveux bouclés, ses cothurnes ornés de gracieux masques, trahissent une composition du Mantegna. Quant au paysage, Giulio l'a pris dans la Vierge au singe, d'Albert Dürer. Cet emprunt nous permet de placer la facture de cette charmante estampe après l'année 1506, les gravures d'Albert Dürer n'ayant dù se répandre en Italie qu'après son voyage à Venise.

7

L ENFANT AUX CHATS

Haut. 85 mill. Larg. 70 mill.

Un jeune enfant nu est assis sur une marche, près d'un piédestal, sur lequel sont posés, à gauche, trois chats qu'il caresse. Le sol est couvert de dalles alternativement blanches et noires.

Cette pièce ne se trouve, à notre connaissance, qu'au British

Museum, qui l'a acquise à la vente Wilson. Elle n'est point une des plus importantes et des mieux réussies du maître, mais elle est une de ses plus rares, et elle donne parfaitement la manière de graver au maillet, que Campagnola adopta dans ses derniers temps; aussi l'avons-nous fait reproduire pour accompagner cet article.

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Un jeune berger, assis sur un tertre, vient de cesser de jouer d'une double flûte, qu'il tient de la main gauche. Il appuie son bras droit sur une souche, dans une pose nonchalante et pleine de charme.

On aperçoit à droite, dans un creux, la tête d'un vieillard. Une haute montagne et un village emplissent le fond du paysage.

De cette pièce exquise, gravée certainement d'après Giorgione, le British Museum possède une épreuve extrêmement curieuse, qui nous permet de savoir comment Giulio procédait dans sa gravure. Les contours et les ombres les plus fortes sont seuls exprimés par des tailles très-sobres

et d'une extrême finesse, que Giulio a plus tard couvertes par le travail au pointillé.

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A. 7. u haut de la

Copie par Augustin Vénitien, qui l'a signée de ses initiales droite. La tête du vieillard ne se trouve point dans cette reproduction.

Copie en contre-partie par un anonyme, qui n'a point omis la tête du vieillard, mais qui est resté fort inférieur à Augustin Vénitien.

9

LE CONCERT

Larg. 257 mill. Haut. 135 mill.

Quatre bergers, trois hommes et une femme, exécutent, à l'ombre de grands arbres, un concert. La femme joue seule, pour le moment, de la flûte; deux des hommes ont les yeux fixés sur elle, et le troisième s'amuse à tremper l'archet de son rebec dans un ruisseau qui coule à ses pieds. A droite, un gracieux village étage ses maisons pittoresques sur le dos d'une colline ondulée. Ce village, qui ne compte plus que quelques masures en bois agréablement mêlées à la verdure, fut autrefois une ville importante où les Romains élevèrent un amphithéâtre aujourd'hui en ruine. Dans le lointain, on aperçoit un second hameau bâti sur un mamelon, au pied de hautes montagnes qui bornent l'horizon.

Cette pièce a été copiée en contre-partie par Augustin Vénitien. C'est du moins son burin et ses habitudes de pillage que nous croyons reconnaître dans une copie tresmaladroite, où les arbres de gauche ont été changés pour d'autres pris au Jugement de Paris de Marc-Antoine. Le fond si joli de l'estampe du Campagnola a été remplacé par un emprunt fait stupidement à la même estampe de Raimondi; Augustin a fermé l'horizon par une colline qui vient en avant et par deux bœufs de colossale grandeur.

Le Cabinet des estampes de Paris possède encore une copie en contre-partie qui semble être due à l'artiste qui a contrefait la Femme couchée et le Vieux Pasteur. Toute la partie de droite est entièrement blanche. Cette copie a-t-elle été jamais finie, ou a-t-elle été en partie effacée à la pierre ponce? C'est ce que nous ne pouvons décider, tout en penchant pour l'effacement.

Un intérêt historique, important pour les biographes de Giulio et de Domenico Campagnola, s'attache à cette pièce. Toute la partie de droite a été traitée par Giulio d'un burin gêné, sec et fin, tandis que toute la partie de gauche, paysage et figures, a été exécutée par la pointe vive et libre de Domenico. Cette communauté de travail, que nous avons déjà trouvée dans un dessin1, n'est-elle point une preuve suffisante de la parenté très-rapprochée qui existait entre Giulio et Domenico? Dans la manière dont Domenico et Giulio ont exprimé le feuillé des arbres on sent, malgré la différence des procédés, que tous deux voyaient la nature suivant les mêmes principes. Cette conformité de vue ne vient-elle pas aussi

4. Voir à la page 336.

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