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TROUARD père, intendant des bâtiments du roi et sous-inspecteur du château de Versailles; grand prix de 1750; † 1778. Acad. 1769.

VIGNY (... de); † 1772?— Acad. 1723. Démissionnaire en 1758.

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WAILLY (Charles de), élève de Blondel; architecte du roi; † 69 ans, 2 nov. 1798. Acad. 1767; puis, membre de l'Institut.

DROIT

DES PEINTRES ET DES SCULPTEURS

SUR LEURS OUVRAGES

La propriété artistique est encore si mal définie, si peu connue, si vague et si précaire, sous l'empire de la jurisprudence imparfaite et indécise qui la régit, qu'on doit désirer avec impatience la promulgation d'une loi qui réglerait enfin d'une manière fixe le droit des peintres et des artistes sur leurs ouvrages. On assure que cette loi est à l'étude et qu'elle sera présentée à l'examen du Corps-Législatif dans la session prochaine. Nous croyons utile, à cette occasion, de remettre en lumière, comme le document le plus important qu'on puisse apporter à l'appui du droit des artistes, un Mémoire que notre grand peintre, M. Horace Vernet, avait rédigé en 1840 pour éclairer la question et préparer le travail du législateur.

On a certainement oublié qu'en 1838 le ministre de l'instruction publique, M. le comte de Salvandy, avait tenu à honneur d'attacher son nom à une espèce de code de la propriété littéraire, ou plutôt intellectuelle, puisque la propriété artistique y était comprise. Le projet de loi, conçu par le ministre et lentement élaboré par une commission nommée au sein de la Chambre des Pairs, ne fut discuté dans cette Chambre qu'au mois de mai 1839 et ne fut adopté qu'après de vifs et longs débats, par 78 voix contre 31. C'est alors que M. Horace Vernet fit appel à l'Académie des Beaux-Arts, en l'invitant à intervenir dans une circonstance aussi solennelle. En effet, le droit des peintres et des sculpteurs sur leurs ouvrages avait été méconnu non-seulement dans la nouvelle loi de la propriété littéraire, mais encore dans la discussion publique de cette loi, qui allait reparaître à la Chambre des Députés pour y recevoir sa sanction définitive. L'Académie des Beaux-Arts unit activement ses efforts à ceux de M. Horace Vernet, et le rapport qu'elle publia, pour critiquer les dispositions du projet de loi relatives à la propriété artistique, reproduisit presque textuellement les opinions et les arguments qu'elle avait trouvés dans le manuscrit de son illustre instigateur. Le résultat de cette protestation éclatante était inévitable : la Chambre des Députés, après avoir consacré huit ou dix laborieuses séances à la discussion de cette loi avortée, la rejeta dans son ensemble (6 mars 1841) et

déclara de la sorte implicitement que les droits des artistes n'avaient pas été sauvegardés par les auteurs du projet de loi sur le projet littéraire.

Le Mémoire de M. Horace Vernet avait été imprimé à un petit nombre d'exemplaires, au moment où la Chambre des Députés s'apprêtait à discuter la loi adoptée deux ans auparavant par la Chambre des Pairs; il ne fut distribué qu'à quelques amis de l'auteur, et il est devenu tellement rare, qu'on le chercherait en vain, si on avait besoin de s'en servir dans l'élaboration d'une nouvelle loi destinée à établir la jurisprudence artistique. Nous voulons qu'on le trouve du moins dans notre Annuaire des Artistes et des Amateurs, qui conservera son utilité longtemps après l'époque de sa publication et qui sera toujours consulté comme un répertoire de renseignements précieux pour l'histoire de l'Art.

P. L.

Le projet de loi sur la propriété littéraire, adopté par la Chambre des Pairs, renferme une disposition reproduite dans le projet de loi présenté à la Chambre des Députés par M. le ministre de l'instruction publique, disposition qui est de nature à soulever de justes réclamations de la part des peintres et des sculpteurs, dont elle lèserait les droits et compromettrait gravement les intérêts, si elle recevait la sanction de la Chambre des Députés. Cette disposition est celle de l'article 13 du projet.

Elle est ainsi conçue :

<< Les auteurs des ouvrages d'arts, mentionnés dans l'article ་ précédent (1), pourront céder le droit exclusif de les reproduire <«< ou d'en autoriser la reproduction, en conservant néanmoins <«< eux-mêmes la propriété de l'ouvrage original.

« Mais en cas de vente dudit ouvrage, le droit exclusif de le reproduire ou d'en autoriser la reproduction par l'impression, « la gravure, le moulage, ou de toute autre manière, est transmis « à l'acquéreur, à moins d'une stipulation contraire. »

Cet article, qui a passé inaperçu dans la discussion à la Chambre des Pairs, a cependant une portée immense pour les artistes. En leur réservant l'usage illusoire d'une faculté, il les dépouille d'un droit acquis qui constitue à lui seul la propriété artistique des peintres et des sculpteurs.

(1) Cet article consacre le droit de propriété des auteurs de dessins, tableaux, sculptures, etc., sur leurs ouvrages.

S'il était définitivement adopté, il s'ensuivrait que la loi, qui a pour but d'assurer les droits des auteurs sur leurs productions dans les lettres et dans les arts, but qu'elle atteint pour certains de ces auteurs, se trouverait pour d'autres être une loi de spoliation.

Telle n'a pas été, sans nul doute, l'intention de la noble Chambre qui, mieux éclairée, lorsque, comme nous l'espérons, le projet lui reviendra amendé par l'autre Chambre, s'empressera alors de réparer une erreur qui aurait eu une pareille conséquence.

Ce ne peut donc avoir été que par méprise que la commission, qui a été chargée par la Chambre des Pairs d'examiner le projet de loi, a motivé l'article 13, dans les termes suivants, extraits textuellement de son rapport :

<< Cette disposition semble si naturelle et si conforme à la raison, » qu'on eût pu croire qu'elle était inutile, si des prétentions » élevées à ce sujet par quelques artistes ne l'avaient rendue >> nécessaire. >>

Il nous sera facile de démontrer que cette disposition n'est : 1o Ni naturelle, ni conforme à la raison;

2° Qu'on eût dû la juger plus qu'inutile, car elle est un souveraine injustice;

3° Que ce qu'on appelle les prétentions de quelques artistes n'est autre chose que la juste revendication d'un droit naturel, reconnu par la loi, consacré par la jurisprudence ;

4° Enfin, que cette disposition prétendue nécessaire n'est motivée par rien, et que, sans présenter aucun avantage, elle donne naissance à de nombreux et très-graves inconvénients.

Toute propriété a pour origine le travail : les œuvres d'art sont le produit du travail de l'auteur; elles sont une création qui lui appartient; il est donc naturel et conforme à la raison, qu'il en ait la propriété, c'est-à-dire qu'il recueille tous les bénéfices que ces œuvres sont dans le cas de produire. S'il y a deux manières distinctes de tirer parti de l'ouvrage, et que ces deux manières n'aient rien d'incompatible entre elles, l'auteur a le droit d'en user concurremment ou successivement. C'est ce que le projet de la Chambre des Pairs reconnaît lui-même et consacre en principe dans plusieurs cas, ainsi que nous le dirons plus tard.

Le peintre a deux moyens de tirer de son tableau des avantages pécuniaires, savoir:

La vente du tableau même,

Et la cession du droit de le graver.

On ne contestera pas sans doute qu'un peintre, qui a cédé à une personne le droit de graver son tableau, n'en reste pas moins. propriétaire de ce tableau. Il est évident qu'il peut le vendre à un autre individu, sans que le graveur soit fondé à se plaindre. En agissant ainsi, le peintre transporte deux objets distincts, savoir :

Un objet intellectuel consistant dans le droit de reproduire le tableau par la gravure;

Et un objet matériel consistant dans la toile que son pinceau à su animer.

Réciproquement, le peintre, après avoir vendu le tableau, peut céder le droit exclusif de le graver.

Voilà donc deux droits parfaitement distincts attachés à une même propriété. Or, nul n'est présumé renoncer à son droit; conséquemment, l'homme qui a deux droits et n'en transfère qu'un à autrui, est censé se réserver l'autre.

Ici donc, la vente du tableau ne saurait emporter, ni naturellement, ni raisonnablement, la cession du droit de le graver. C'est cependant le contraire qui a été décidé par la Chambre des Pairs. Elle a posé en principe, dans l'article 13, que le droit de gravure est en quelque sorte un annexe du tableau même. Mais, comme nous venons de le prouver, ce droit ne dérive nullement de la possession du tableau; il est inhérent à la création qui procède du talent et du travail de l'auteur; il est, comme disent les jurisconsultes, incorporel, il ne suit pas la chose, il reste attaché à la personne, parce qu'il a pour base des faits qui sont compris dans la personne même.

Il faut donc qu'il y ait de la part du peintre une cession formelle du droit de gravure, pour qu'il en soit dessaisi. Une telle cession ne peut jamais naturellement se présumer; la raison ne le veut pas, et jusqu'ici la loi ne l'avait pas voulu non plus. En cela elle agissait sagement et conformément à toutes les règles du droit. En

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