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« putasset, jam nimio usu vilescere occeperint. Nec in una domo aut <«< familia novitium hæsit inventum magna ex parte vicus hujusmodi << fervet officinis. »

Contrairement aux autres corporations soumises au pouvoir de magistratures inférieures, la République plaça en 1490 tous les arts de la verrerie sous la très-vigilante inspection de l'illustre conseil des Dix. Il n'est donc pas étonnant que ces arts, ainsi protégés dans la seconde moitié du xve siècle, aient atteint leur plus grand éclat dans les premières années du suivant. La fabrication des perles fausses à la lampe d'émailleur rendit immortel le nom d'Andrea Vidaore, à qui on en doit sinon la réinvention, du moins le perfectionnement en 1528; en créant l'industrie du souffleur (soffialume), il favorisa singulièrement la production du jais, dont le commerce se répandit dans les régions les plus lointaines. Ce fut vers cette époque que le Bolonais frère Leandro Alberti visita nos fours, admirant et louant l'élégance et la multiplicité des formes et des ornements des verreries, la variété des nuances, la grande dimension des vases et l'activité de vingt-quatre fabriques, donnant surtout des éloges spéciaux à Francesco Ballarino. Il parle, comme de véritables merveilles, d'une galère de verre, longue d'une brasse et pourvue de tous ses agrès, et d'un orgue, pareillement en verre, dont les tuyaux donnaient les sons les plus

suaves.

La réduction du verre en cristal, opérée avec beaucoup de bonheur au xve siècle, aplanit la voie au perfectionnement d'un art, et ajouta une nouvelle couronne à toutes celles qui ornaient notre île. Déjà, dans les premières années du xiv siècle, on avait pensé à remplacer les pesants miroirs d'acier, ou d'autre métal, faciles à ternir par la rouille, et d'un grand prix, par une plaque de verre garnie au revers d'une feuille métallique qui renvoyait les images. En effet, sous la date du 5 février 1318, nous lisons, dans les actes du grand conseil, que deux Vénitiens et un Muzio de Murano s'entendirent avec un maître allemand, qui vitrum a speculis laborare sciebat, et fecerunt ipsum dictam artem laborare. L'entreprise semble n'avoir pas eu de succès, et l'on était revenu aux miroirs de métal, pendant que les Allemands et les Flamands allaient toujours perfectionnant ceux de verre. On croit que la résurrection de cet art à Murano, au commencement du xve siècle, est due à un nommé Vincenzo Roder; mais un document que nous a bienveillamment communiqué un Anglais, M. Randon Brown, qui depuis si longtemps s'occupe de notre histoire avec tant de zèle et de succès, en revendique toute la gloire pour deux autres Muranésiens, Andrea et Domenico dal Gallo, fils d'Angelo. Ces deux verriers présentèrent en 1507, au conseil des Dix, une

supplique exposant que, au prix des plus grands sacrifices, ils avaient trouvé le secret de faire de bons et parfaits miroirs de verre cristallin, chose précieuse et singulière, et inconnue dans le monde entier, si l'on excepte une maison d'Allemagne, qui, associée avec une maison flamande, exerçait le monopole de cette fabrication, et écoulait ses produits au levant et au couchant à des prix excessifs. Ils ajoutaient que, voulant qu'un tel zogielo (italien, giojello; français, bijou) ne manquât pas à Murano, et prévoyant qu'ouvrir un four spécial pour les miroirs demanderait des sacrifices encore plus grands de la part des contractants, et que d'ailleurs ils éprouveraient un grand dommage en enseignant cet art à d'autres, ils suppliaient qu'on voulût bien leur donner un privilége de vingt-cinq ans sur tout le territoire de la République et la permission de tenir en activité leurs fours pendant les deux mois et demi que ceux de Murano étaient éteints 1. Le conseil des Dix accéda à la demande des

1. Andrea d'Angelo, dit dal Gallo, parce que sa fabrique avait pour enseigne un coq (gallo, qui est aussi les armes de Murano), fut, en 1502, député de cette communauté, et l'un des vingt-deux qui se réunirent pour fixer les statuts muranésiens; il fut juge dans l'île pendant les années 1514, 1519 et 1522, et vivait encore en 4539, aussi bien que son frère Dominique qui, deux années auparavant, avait exercé aussi la charge de juge. Ces renseignements se trouvent dans le tome VI, page 375, Inscrizioni Veneziane du chevalier Emmanuel Cicogna. Voici le texte original de la supplique présentée au conseil des Dix par les deux fils d'Angiolo dal Gallo:

« Excellentissimis Dominis Capitibus Consilii X.

« Illustrissimi signori. Havendo nuy Andrea et Domenego d'Anzolo dal Gallo, vos<« tri fidelissimi citadini de Murano, cum lo inzegno fatica et spesa nostra tandem trovà « el secreto de far spechij de vero cristalin, cosa preciosa et singular per non esser in << tuto el mondo, se puol dir, alcuno habia questo secreto che sia bon et perfecto, salvo <«< che una sola casa in Alemagna, quale ha correspondentia cum un altra in Fiandra « de dove se fornisse el Levante e'l Ponente el tuto el mondo, vendendo a precij ex<«< cessivi a suo modo, cum tenir la merchantia in gran riputation: Et volendo nuy « quello metter in opera, et far che questo zogielo sia in questa cità, hoc est a Muran, «< appresso le altre bellissime cose se fano de : oltra le altre spese grande che ne sarà « forza fare, conveniremo tuor famigli et altre persone che ne adjuta: Et dubitando « nuy che quelli, imparato che havesseno, et le insegneriano ad altri over se metteriano <«< etiam epsi a far tal arte, et saria la nostra total ruina: Et pertanto supplichamo le « Excellentissime Signorie Vostre che avanti intriamo in tanta spesa, et cossì proficuo « utile et bella cosa a quesla inclyta cità, se degnano cum lo suo Exmo Conseglio di X «< concederne de gratia: che per anni xxv proximi non sia alcuno possi, nè in questa <«< terra nè a Muran nè in alcuna terra over loco del dominio de le Signorie Vostre far « nè far far simel specchij de vero over cristallinj, salvo che nuy fradelli et fioli nostri : «< sotto pena de ducati 500 d'oro a chi contrafaresse a questo ordine over concessione, « da esser applicada alla camera del prefato Exc. Conseglio di X. Et perchè fra mesi

deux frères par un décret du 19 mai 1507, mais en restreignant le privilége à vingt années1 dans le double but, d'un côté, d'être utile aux réinventeurs du nouvel art, et, d'un autre côté, de ne pas se montrer partial en accordant une trop longue durée au privilége. En 1564, les miroitiers, alors très-nombreux, se réunirent en une confrérie séparée des

autres, qui eut ses statuts et ses registres. Aussi, bien que les innovations introduites de nos jours dans cette fabrication au delà des Alpes aient

<«<tre proximi circa se lieva el fuogo de la fornaxe a Muran per mesi due et mezo, che <«< a nuy sia concesso in questo tempo vacante per dicti anni xxv poter de continuo << tenir fuogo in le nostre fornaxe et lavorar, et far tal opera de specchij solamente et « non altro, per mazor comodo et ubertà de tanta mirabel vertù da tuti molto deside«rata in questa inclyta cità. Et alle Signorie Vostre Excellentissime humilmente se rac«<commandamo. >>

4. «MDVII, die XVIII maij. In Consilio X.

« Quod auctoritate hujus Consilii concedatur suprascriptis Andreæ et Dominico de « Angela a Gallo fratribus, fidelissimis civibus nostris Murani, quantum petunt, et in << suprascripta eorum supplicatione modo lecta continetur, per annos xx proximos ta« men. Præcipiendo tam quibuscumque magistratibus et officialibus hujus urbis Vene<«<tiarum, quam potestati Murani et reliquis rectoribus et officialibus quarumcumque « terrarum et locorum nostrorum ut observare et observari facere debeant inviolabili

<< ter concessionem suprascriptam prout jacet, sub pœna specificata in supplicatione «< ipsa.

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rendu possibles des miroirs qui, tout en dépassant de beaucoup les dimensions des miroirs vénitiens, sont cependant bien loin de pouvoir leur être comparés pour la netteté de la réflexion, les premiers produits de nos fabriques sont toujours avidement recherchés.

C'est en vain que d'autres, et moi-même avec eux, avons cherché l'origine du singulier privilége concédé par la République aux habitants

de Murano de frapper annuellement à la Monnaie de Venise des méreaux ou pièces de congiario (le congiarius est, en latin, l'officier chargé des distributions de blé faites au peuple); et, comme les premières frappées avaient le poids et la valeur des oselle 1 introduites en 1521, elles en portèrent aussi le nom. La première osella de Murano est de 1581 et fut exécutée sous le podestat de Zaccaria Ghisi; mais, après cette année-là, il y a une lacune de presque un siècle, car la série ne reprend qu'en 1673, pour continuer sans interruption jusqu'en 1796. Un petit nombre de

4. Les oselle sont des médailles frappées par les doges à leur avénement, et distribuées gratuitement.

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