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Le moindre mouvement
Le moindre mouvement

1863.

internationales. Nous avions lieu de penser que cette convention du 8 février permettait aux No. 601. Frankreich, troupes de l'une ou de l'autre des Puissances de franchir réciproquement la frontière, et 19. März changeait ainsi les relations ordinaires internationales à l'occasion d'un fait intérieur propre à un seul des deux Gouvernements. Fondé sur les sentiments qu'indiquaient les paroles prononcées à la tribune anglaise, nous avons proposé au Gouvernement britannique d'agir de concert près de la Prusse. Les dépêches par lesquelles cette proposition était faite sont du 21 février. Après quelques jours d'attente, l'Angleterre nous a fait connaître qu'elle voyait des inconvénients à une action collective; je me trompe, nous n'offrions même pas l'action collective: nous offrions l'action simultanée par des notes analogues remises séparément. L'Angleterre nous fit savoir le 1er mars qu'elle n'approuvait pas cette marche, et le 2 elle envoyait à Berlin et à Pétersbourg des dépêches analogues à celles que nous avions écrites dès le 19 février, mais qui, restant isolées, devaient à notre sens avoir bien moins d'effet. Toutefois une autre force s'était jointe aux nôtres. Le parlement prussien avait manifesté contre la convention une opposition très-énergique; cette convention n'a pas été ratifiée et semble devoir rester à l'état de lettre morte. Voilà, messieurs, quant à présent, l'état des négociations. Qu'y avait-il à faire de plus? Pour s'en rendre bien compte, il faut, en face de la situation des Puissances telle que je vous l'ai décrite, examiner quelle est notre propre situation. Depuis dix ans, messieurs, grâce à la politique de l'Empereur, la situation de la France a été profondément modifiée. A la suite de nos grandes expansions révolutionnaires et militaires de la fin du siècle dernier et du commencement de celui-ci, la France était devenue profondément suspecte aux souverains et aux peuples. libéral de sa part provoquait la sainte alliance de souverains. militaire provoquait chez les peuples la crainte de nouvelles conquêtes, de nouvelles invasions. Nos ennemis, exploitant habilement les sentiments nationaux, avaient fini par nous entourer d'un réseau qui nous réduisait à une complète impuissance. Nous ne pouvions pas faire un mouvement que nous ne fussions immédiatement pressés par l'Europe tout entière nous tenant étroitement garrottés dans les liens des traités de 1815, et nous maintenant avec un soin jaloux dans un perpétuel isolement. ¶ C'est ainsi que la branche aînée se trouvait amenée malgré elle à faire contre un peuple libre, par delà les Pyrénées, une guerre qu'elle n'aurait pas voulu faire. ¶ C'est ainsi que la branche cadette, en 1840, lors de la question d'Orient, se trouvait subitement isoléc, impuissante et seule contre l'Europe tout entière. Eh bien, messieurs, ces temps-là ne sont plus. La liberté dont, à l'éternel honneur de notre pays, nous sommes les promoteurs dans le monde, ne crée plus autour de nous ces inquiétudes et ces ombrages. Notre Empereur, en saisissant les rênes du Gouvernement, a comprimé toutes les turbulences qui pouvaient inquiéter l'Europe; il a séparé l'ivraie du bon grain, en conservant tout ce que la Révolution nous avait légué de bon, de patriotique, d'utile, de civilisateur, et en réduisant à l'impuissance toutes les passions subversives qui détruisent la plupart du temps le bien qu'elles ont la prétention d'accompagner. (Vive adhésion.) Cest qu'en même temps que cet exemple d'une liberté réglée, bonne pour les peuples et pas inquiétante pour les souverains, était donné, en même temps, par l'exemple même et par le mouvement naturel des choses, cet esprit de liberté se répandait en Europe. ¶ Notre Empereur a mis dans ce progrès une grande et puissante main. Partout, et autant qu'il le pouvait, il a aidé à l'avénement de la liberté. Ce grand mouvement libéral gagne successivement toute l'Europe, et il devient entre nous et les autres peuples un puissant lien de sympathie. Nous le voyons maintenant dominer, non pas seulement à Madrid et à Turin, mais encore en Allemagne, en Prusse, en Autriche. Il est évident qu'il se fait dans les esprits, dans ceux des peuples comme dans ceux des Gouvernements, un mouvement qui ne peut être que favorable à notre situation en Europe. Nous ne pouvons plus, de ce chef, être suspects aujourd'hui: la liberté glorieuse et calme, telle que l'a faite l'Empereur, ne donne plus d'inquiétude au monde; c'est un exemple pour les uns et un encouragement pour les autres. (Approbation.) ¶Cette première difficulté de notre situation a donc disparu; il en a également disparu une autre. La force militaire de notre pays, démontrée par tant de succès glorieux, était pour certains peuples de l'Europe une incessante préoccupation. Puissante quoique isolée, on s'obstinait à considérer la France comme ambitieuse

No. 601. et menaçante: l'Empereur s'est attaché à faire disparaître également cette préoccupation: Frankreich, "toutes les fois qu'il a eu lieu de faire emploi de ses forces, il s'est appliqué à n'agir jamais

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seul. Sa politique a été, dans toutes les grandes questions qui s'élévaient en ce monde, de
rechercher tout d'abord quelles étaient les Puissances ayant des intérêts similaires à ceux
de la France, et de ne s'engager qu'avec elles. La simultanéité de l'action était une garantie
contre les prétentions personnelles et exclusives, et ne laissait plus aux calomnies prétexte de
cette jalousie qui a souvent inquiété et excité contre nous les peuples voisins de la France.
(Nouvelle approbation.) ¶ Partout l'Empereur a suivi cette politique; vous l'avez vu dans
la guerre de Crimée, ayant l'Angleterre et l'Italie pour alliées et l'Autriche bienveillante ;
vous l'avez vu dans nos expéditions lointaines, uni avec l'Angleterre en Chine, avec l'Espagne
en Cochinchine; lorsque la question de Syrie s'est agitée, vous l'avez vu, missionnaire de la
civilisation et protecteur des chrétiens, envoyer, au nom de l'Europe tout entière, notre drapeau
protecteur sur les côtes de Syrie. Vous l'avez vu, aujourd'hui qu'une guerre déplorable
accumule dans le nouveau monde des misères effroyables sur des peuples qui devraient être
frères, vous l'avez vu provoquer de toutes ses forces l'action des grandes Puissances humaines
et libérales, pour, sans porter aucun préjudice, sans porter aucun ombrage à l'indépendance
des Américains, les ramener à des sentiments de paix et de fraternité si nécessaires pour eux et
aussi pour l'Europe. Si dans cette tentative généreuse il n'a pas été écouté, il n'en persiste pas
moins dans cette politique d'association et d'influence commune, la seule vraiment et efficace pour
réaliser à notre époque tout ce qui est praticable, bon, utile, généreux, libéral, en écartant, autant
que possible, toutes les chances de guerre et de jalousies politiques. (Vive adhésion.) ¶ Vous
l'avez vu dans la question du Mexique, cette question qui maintenant pèse sur nous seuls,
n'avoir songé à l'entreprendre qu'après s'être assuré le concours de l'Espagne et de l'Angleterre.
Par des raisons que je n'ai plus à examiner, il est resté seul, et l'honneur français engagé
nous a imposé de lourds devoirs. Mais sa pensée politique a toujours été la même: ne rien
entreprendre qu'en s'assurant les meilleures conditions, pour ne pas porter ombrage, ne pas
exciter l'inquiétude ou la jalousie, ne pas raviver les sentiments hostiles qui créèrent autrefois
la Sainte Alliance et ameutaient à chaque pas l'Europe tout entière contre nous; agir surtout
par la raison, par la démonstration des véritables intérêts; convaincre ceux qui ont des
intérêts similaires, et, quand on les a réunis en une seule conviction, peser alors sur les
questions de tout le poids de la raison et de l'autorité communes. (Très-bien!) Voyez,
messieurs, quels résultats a produits cette politique. Comparez la France d'aujourd'hui
et celle d'il y a quinze ans: aujourd'hui considérée, respectée, puissante, aimée de beaucoup,
crainte de ceux qui ne l'aiment pas. (Très-bien.) Voilà la France telle que l'Empereur l'a refaite,
fixant sans cesse son attention sur les intérêts de son pays, et cherchant toutes les combinaisons
d'amitiés et d'intérêts communs qui, sans effusion de sang et au grand bien de l'humanité, peuvent
faire prévaloir ses vues. (Très-bien! très-bien!) ¶ Messieurs, cette politique qui a fait la France
si grande et son Souverain si respecté, croyez-vous qu'il convienne de l'abandonner pour la
question polonaise? (Voix nombreuses. Non, non!) ¶ Croyez-vous qu'il faille, précisément pour
la question qui referait le plus facilement la sainte alliance contre nous, -car en 1815 elle a
été surtout posée dans ce but, croyez-vous qu'il soit politique de prendre ainsi le fardeau
à soi tout seul, au risque de toutes les hostilités qu'on pourrait raviver et réunir contre soi?
(Assentiment.)¶La question de la Pologne est éminemment européenne. Nous n'y avons
ni une politique particulière ni une action isolée; elle intéresse et oblige autant les autres
grandes Puissances que nous. Elles se doivent à elles-mêmes (si elles ont le sentiment du
bien, du droit, du juste, de la civilisation), elles se doivent à elles-mêmes de se joindre à
nous et, pratiquant avec nous cette politique à la fois pacifique et libérale, d'essayer de faire
comprendre à la Prusse et à la Russie leurs vrais intérêts et les nôtres, en leur expliquant
ce que l'humanité, la paix de l'Europe, la nécessité leur imposent de faire pour elles-mêmes.
¶ Croyez-vous que cette politique ainsi pratiquée ne soit pas cent fois plus puissante que des
tentatives isolées, qu'elle n'offre pas en même temps plus de chances d'éviter ou l'insuccès ou
un conflit? Voilà, messieurs, comment l'Empereur envisage la question. L'Angleterre
n'est peut-être pas éloignée d'entrer dans une voie analogue. Jusqu'où ira-t-elle dans cette
voie? L'avenir l'apprendra. Mais enfin, nous croyons savoir qu'elle a elle-même, au point

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de vue de cette situation et de la nécessité de la résoudre, fait un appel, isolé, mais enfin un No. 601. Frankreich, appel à toutes les Puissances signataires des traités de 1815. Que produira cet appel? Nos 19. März vues politiques, qui y sympathisent, pourront-elles y trouver une réalisation? Je me garderais bien ni d'en raisonner, ni d'en rien pronostiquer. Là est le commencement d'une oeuvre diplomatique, sur laquelle toute parole serait aujourd'hui imprudente et prématurée. Vous savez maintenant quelles sont les aspirations de l'Empereur; vous savez quels moyens il entend employer; vous savez ses sympathies. Maintenant fiez-vous à sa politique. (Adhésion.) ¶ J'ai expliqué, messieurs, autant qu'il était en moi, autant que bien des embarras, inhérents à des questions si délicates, me le permettaient, tout ce qui me semblait nécessaire pour faire connaître au Sénat, au pays, au monde, comment le Gouvernement envisage la situation. Vous avez maintenant votre vote à émettre: ce vote, la commission vous le propose sous la forme d'un ordre du jour, le Gouvernement vous le demande nettement sous cette forme. ¶Si j'eusse parlé avant la séance d'hier, je vous aurais donné des raisons générales, je vous aurais dit: L'ordre du jour est un blâme quand on rejette une pétition comme mal fondée, mais l'ordre du jour n'est ni un blâme, ni un échec quand ce que demande le pétitionnaire a été fait à l'avance par le Gouvernement. (C'est cela. Très-bien!) Les pétitionnaires demandent que le Gouvernement s'occupe de la question polonaise, et la résolve; les uns disent par la guerre, les autres par la diplomatie. Le Gouvernement, avant qu'ils signassent leurs pétitions, avait commencé à s'en occuper efficacement. Croyez-vous qu'il ait besoin qu'on appelle son attention sur cette question si grave et si ardente? Elle y est depuis longtemps fixée, et ce que vous avez lu des dépêches de 1855 vous démontre que jamais cette attention ne sommeille. Croyez-vous qu'il soit nécessaire, en tous cas, de lui dire: Vous n'avez pas fait assez? La situation est trop complexe et trop grave pour que le Sénat voulût prononcer de pareilles paroles.¶Vous ne pouvez donc dire qu'une chose aux pétitionnaires: Vous avez pour la Pologne des sentiments que nous partageons, vous demandez qu'on s'occupe d'elle; l'Empereur s'en occupe activement; il est par conséquent parfaitement inutile de lui renvoyer votre avis; ce que vous demandez était fait avant que vous n'y eussiez pensé. J'aurais dit encore au Sénat: C'est là votre jurisprudence la mieux constatée; je ne vous parle pas des précédents d'autres corps que le Sénat; on vous a cité ceux de 1831. Sous le coup de la lutte cruelle qui déchirait la Pologne, les pétitions qui arrivaient à la chambre des députés étaient renvoyées énergiquement par la Chambre au Gouvernement d'alors. L'opposition lui reprochait de n'avoir ni résolution ni énergie, et le poussait l'épée dans les reins, et alors lui renvoyait les pétitions qu'il n'osait repousser. En sommes-nous là aujour d'hui? (Voix nombreuses. Non! non!) ¶ Je ne rappellerai pas davantage cette pétition de 1848 que vint appuyer une émeute dont le passage de quelques hommes tout à l'heure sous les fenêtres de votre palais n'est qu'un bien petit et impuissant souvenir. Sur cette pétition présentée à l'assemblée républicaine, nationale, après de longs discours au milieu de toute la fermentation populaire, le comité des affaires étrangères proposa et l'assemblée adopta que la politique de la république fût l'indépendance de la Pologne, mais avec l'alliance et le concours de l'Allemagne: pacte fraternel avec l'Allemagne et indépendance de la Pologne ; l'un n'allait pas sans l'autre. (Sourires d'adhésion.) ¶ De préférence à ces précédents, permettezmoi de vous rappeler les vôtres. ¶ Deux questions se sont présentées devant vous, excitant à un très-haut degré toutes vos sympathies. En 1860, des pétitions nombreuses, inquiètes de la situation du Saint-Père. préoccupées de son pouvoir temporel, vous demandèrent d'appeler l'attention du Gouvernement. Vous avez, à une immense majorité, passé à l'ordre du jour, non pas que vos sympathies, comme je le disais tout à l'heure, fussent douteuses, ou que l'on manquât de vous dire alors, comme aujourd'hui: L'ordre du jour indiquera le refus d'appui, le défaut de sympathie; il sera, en tout cas, mal interprété; vos intentions seront calomniées; mais vous répondîtes: Nous avons confiance dans le Gouvernement de l'Empereur, nous savons ses sentiments, nous nous en rapportons à lui, et nous passons à l'ordre du jour. (Très-bien!)¶Une autre fois, en 1861, il s'agissait de la Syrie; on craignait de nouveaux massacres des chrétiens d'Orient; des pétitions nombreuses, parmi lesquelles se trouvait précisément celle de l'un des signataires principaux des pétitions actuelles, M. Saint-Marc-Girardin, vinrent faire appel à vos sympathies, exciter vos inquiétudes, vos Staatsarchiv IV. 1863.

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No. 601. préoccupations; on vous demandait également de rappeler au Gouvernement qu'il y avait Frankreich, en Orient des chrétiens que la France avait toujours patronnés. Nous vous disions à notre 1863. tour: Nos sympathies pour ces chrétiens ne sont pas douteuses, nous les avons toujours protégés et nous entendons continuer de le faire. Mais le renvoi au Gouvernement impliquerait des doutes ou des excitations que nous ne saurions admettre, et le Sénat, dont tous les orateurs avaient été énergiques en faveur des pétitions, convaincu que le Gouvernement avait les mêmes sympathies que lui et ferait ce qu'il y aurait à faire, passa à l'unanimité à l'ordre du jour. Voilà vos précédents. ¶ Je vous dirais encore, si nous étions à avant-hier, je vous dirais Mais vous tous, messieurs, tant que vous êtes, amis sincères de la Pologne, qui désirez que sa situation soit améliorée, est-ce que vous ne croyez pas qu'il est profondément politique de se réunir pour former la majorité la plus nombreuse possible, je dirais, si faire se pouvait, l'unanimité? Unis dans un sentiment commun, allons-nous donc nous diviser pour une querelle des mots, et nous obstiner à exprimer des sentiments semblables, les uns par l'ordre du jour, les autres par le renvoi au Gouvernement? Sommes-nous donc des Grecs du Bas-Empire, et allons-nous sacrifier à de vaines disputes de mots la réalité des choses? (Sensation.) Nous ne le ferons pas, messieurs, à moins que derrière les mots il ne se cache réellement des dissidences sur les choses; mais alors nous ne sommes plus d'accord, et je ne demande pas le vote de ceux qui ne pensent pas comme nous. (Très-bien!) ¶ Voilà, messieurs, ce que je vous aurais dit avant-hier; mais aujourd'hui j'ajouterai autre chose. (Mouvement redoublé d'attention.)¶Dans cette enceinte, sur la question de la Pologne, sur le sympathies pour la Pologne, sur le désir de voir modifier cet état de choses inquiétant pour l'Europe et blessant pour l'humanité, tout le monde a été unanime. Mais, quant à la conduite politique à suivre pour arriver à ce but, il y a eu deux tendances d'une opposition bien marquée. Les uns ont semblé conseiller une attitude, je dirais volontiers révolutionnaire, ardente, énergique, excessive, agressive presque contre tout le monde, ne tenant aucun compte ni de la prudence ni de la circonspection si nécessaires dans ces affaires si délicates, et prête à marcher violemment et seule vers un but que peut-être on n'atteindrait pas. ¶ En regard de cette politique aventureuse, il s'en est produit une autre, sage, mesurée, ferme aussi, mais tenant compte des avantages et des inconvénients, cherchant à réunir à son profit tout ce qu'il peut y avoir de force pour arriver au résultat, ne courant pas de gaieté de coeur à des conflits fâcheux ou à des échecs inévitables, voulant d'abord réunir, s'il est possible, toutes les chances pour résoudre pacifiquement par le poids de légitimes influences une difficulté qui intéresse tout le monde. ¶Eh bien, messieurs, ces deux politiques sont aujourd'hui en face, il faut que vous optiez. On nous a dit hier que le nom de la Pologne était écrit sur les pavés de juillet. Quel rapport cela pouvait-il avoir avec la situation actuelle? (Mouvement.) Le peuple qui écrivait ce mot sur les pavés de juillet, sait aujourd'hui ce qui s'est fait depuis dix ans. Il n'entrera pas dans sa pensée de confondre avec le Gouvernement qu'il renversait alors, ce Gouvernement nouveau si énergique, si résolu, qui a su partout entreprendre ce qu'il fallait entreprendre et mener à bien ce qu'il a entrepris. (Vive approbation.) Ce n'est pas le peuple qui reprochera à l'Empire de n'être ni national, ni énergique; il sait bien à quoi s'en tenir sur ce point. On a ajouté que l'ordre du jour serait contraire à l'esprit qui avait placé sur le trône l'Empereur Napoléon III. Quel est donc l'esprit qui a placé sur le trône l'Empereur Napoléon III?

M. Ferdinand Barrot. C'est l'esprit anti-révolutionnaire qui a porté le prince Louis au pouvoir.

M. le ministre. La France était lasse des convulsions et des impuissances révolutionnaires. Elle sentait les immenses périls amoncelés autour d'elle, elle sentait que tout périssait à la fois, sa gloire, sa grandeur, sa sécurité, sa prospérité materielle, ses croyances religieuses. (C'est cela! - Très-bien! très-bien !)

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S. A. le Prince Napoléon. C'est pour cela que vous avez voté contre Napoléon quand je votais pour (Agitation)... Oui, vous avez voté pour le général Cavaignac. (Rumeurs.)

M. le ministre. Le fait personnel que cite Son Altesse Impériale me paraissait inutile dans ce débat, mais il est vrai. Je n'ai pas voté pour le Prince Président

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No. 601.

S. A. I. le Prince Napoléon. Oh! je ne vous en fais pas de reproche. M. le ministre. Mais depuis dix ans, l'ayant vu à l'oeuvre, je le sers avec fidélité Frankreich, et honneur. (Vive approbation.)

M. le Président. Ces personnalités sont regrettables.

M. le ministre. Ce qui a placé l'Empereur sur le trône, messieurs, ce sont les aspirations de la France vers l'ordre, la gloire et la paix; ce n'est pas le désir d'une nouvelle lutte avec l'Europe, d'une guerre à tout propos, sans aucune espèce de sagesse ni de prudence; et dans les paroles qui ont singulièrement aidé à porter l'Empereur sur le trône, il y en a une, celle de Bordeaux: „L'Empire, c'est la paix," qui n'y a pas peu contribué. Non pas la paix à tout prix, non pas la paix quand même, non pas le sacrifice de la grandeur et des intérêts de la France; l'Empereur a assez prouvé par tout ce qu'il a fait qu'il ne l'entendait pas ainsi. (Très-bien!)¶¶ Oui, il y a ici en présence deux politiques, et c'est entre ces deux politiques qu'il faut que vous optiez. Le Gouvernement de l'Empereur pose ainsi la question, volontairement, résolûment. On a fait appel dans cette enceinte et aux vieux généraux qui, sur nos champs de bataille, ont mêlé leur sang à celui des Polonais, et à ceux qui ont combattu en Crimée; on a fait appel aux cardinaux dont les sympathies religieuses sont certainement acquises au peuple de Pologne. Eh bien, c'est à eux et à vous tous que je fais aussi appel. Il ne s'agit pas ici de sacrifier nos sympathies pour la Pologne; il ne s'agit pas ici de masquer une de ces défaillances sans paroles, ou avec des paroles aussi bruyantes qu'inutiles. (Très-bien!) Il s'agit de choisir entre une politique sensée, sérieuse, efficace, je l'espère, et une politique aventureuse, insensée. (Approbation.) ¶ L'ordre du jour prononcé par vous sera l'approbation de la première et la condamnation de l'autre ; il n'y aura sur ce vote aucune équivoque possible; votre commission l'a expliqué nettement; le Gouvernement l'explique à son tour: il entend bien que ce vote signifiera sympathie pour la Pologne, désir de voir cesser ses malheurs, mais confiance absolue dans la politique, dans la sagesse, dans la fermeté de l'Empereur. (Très-bien! très-bien!) Ainsi clairement précisé, personne, ni en France, ni à l'étranger, ne s'y trompera; personne ne vous soupçonnera d'avoir été indifférents ni oublieux pour ces grands intérêts. Mais par votre vote vous aurez su concilier vos sympathies pour un malheureux peuple et vos devoirs de citoyens envers votre pays.

19. März 1863.

No. 602.

RUSSLAND. Kaiserliches Manifest.

Amnestie für die an dem polnischen Aufstand Betheiligten.

[Uebersetzung.]

Von Gottes Gnaden Wir, Alexander II., Kaiser etc. etc. verkünden allen Unseren getreuen Unterthanen im Königreich Polen:

Seit dem Eintreffen der ersten Berichte von Unordnungen, welche in dem Königreiche Polen ausgebrochen, sind Wir dem Antriebe Unseres Herzens gefolgt und haben erklärt, dass Wir die polnische Nation nicht für die Agitation verantwortlich machen wollen, die für sie selbst die unglückseligsten Folgen gehabt hat. Wir haben sie nur den Aufreizungen zugeschrieben, welche seit langer Zeit im Auslande von einigen Individuen ausgegangen sind, denen lange Jahre eines unsteten Lebens es zur Gewohnheit gemacht haben, Unordnungen und Gewaltthätigkeiten anzustiften und im Dunkeln Complotte anzuspinnen, die bei ihnen die Gefühle, welche man der Liebe für die Menschheit schuldet, ersticken und ihnen selbst den Gedanken einflössen konnten, die Nationalehre durch Verbrechen zu besudeln. Alle diese Kundgebungen eines andern Zeitalters, welche seit langer Zeit durch den Richterspruch der Geschichte abgeurtheilt sind, stimmen

No. 802. Russland, 12. April 1863.

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