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Frankreich,

No. 474. divergences regrettables que les rivalités des diverses communions chrétiennes 12. Jan. faisaient prévoir, si elles étaient directement appelées à concourir à cette œuvre,

1863.

les deux Empereurs sont tombés d'accord pour demander l'assentiment de la Porte à une reconstruction de la coupole aux frais communs de la France et de la Russie. Le Sultan, s'associant à cette pensée, a réclamé, en qualité de souverain territorial, le droit de participer aux dépenses qui seront nécessaires. Un protocole a été signé à Constantinople entre les trois Cours, afin de fixer les conditions de cet accord. Le Gouvernement de Sa Majesté n'a d'ailleurs perdu de vue, dans cette négociation, ni les droits ni les intérêts des religieux latins, et tout en s'inspirant de sentiments de concorde qui ne sont nulle part mieux à leur place qu'en présence d'un sanctuaire également cher à la piété de toutes les communions, il ne s'est en rien écarté d'une des plus nobles traditions de la politique séculaire de notre pays.

L'année dernière, à pareille époque, l'état litigieux d'une partie de nos frontières avait suscité entre nous et la Suisse des contestations de la nature de celles qui se sont si souvent renouvelées depuis 1815 par suite de la situation indéterminée de la vallée des Dappes. Ces difficultés ont été aplanies par des explications ultérieures. Mais, guidé par l'amitié sincère qui l'anime à l'égard de la Suisse, le Gouvernement de l'Empereur a voulu lui en donner un nouveau témoignage en se prêtant à régler d'un commun accord les discussions soulevées par la possession de ce territoire, et il a signé avec la Confédération un traité destiné à fixer d'une manière certaine les frontières respectives. Sans rien sacrifier de nos intérêts, nous avons consenti à abandonner à la Suisse une portion du territoire en échange d'une cession équivalente. L'arrangement qui a été conclu fait disparaître un sujet de mésintelligence entre les autorités locales de la frontière et ne peut qu'exercer une heureuse influence sur leurs relations quotidiennes comme sur les rapports des deux Gouvernements. Ce traité est en ce moment soumis à leur ratification.

Le différend relatif à la position constitutionnelle des duchés de l'Elbe, dans la monarchie danoise, n'a pas cessé de diviser le cabinet de Copenhague et la Confédération germanique. Les parties ont essayé de s'entendre, par voies de communications diplomatiques, sur les bases d'une négociation définitive, et les grandes puissances non allemandes ont cherché, de leur côté, à rendre par leurs conseils un accord plus facile. Pour sa part, le Gouvernement de Sa Majesté n'a cessé de se faire l'organe des idées de conciliation, et autant il se serait estimé heureux de contribuer à un rapprochement, autant il doit regretter que ses efforts soient jusqu'ici restés infructueux.

L'année qui vient de s'accomplir n'a pas amené le dénoûment de la crise que traversent les États-Unis d'Amérique. La lutte se poursuit avec des alternatives de succès et de revers qui menacent de l'éterniser, et la résignation avec laquelle sont acceptés des deux parts les sacrifices extrêmes que cette guerre entraine avec elle ne permet guère d'espérer que la lassitude seule des belligérants les décide à déposer les armes. En même temps, les souffrances qu'impose aux autres pays la fermeture d'une des contrées les plus productives du globe se

multiplient et s'aggravent. On sait quelles sont, en ce qui nous concerne, les No. 474 misères qui éprouvent si cruellement notre industrie.

Le Gouvernement de l'Empereur devait donc suivre avec une sollicitude croissante la marche des événements qui, dès l'année dernière, appelaient déjà si sérieusement son attention. Il désirait toujours concilier le maintien d'une neutralité bienveillante avec les devoirs de protection qui devenaient chaque jour plus impérieux à l'égard de ses nationaux. C'était une tâche que lui rendaient difficile les appels aussi nombreux que pressants qui lui étaient adressés pour le déterminer à soustraire les neutres aux conséquences malheureusement inévitables d'un tel conflit. Il peut affirmer, cependant, que la double considération à laquelle il s'était proposé d'obéir a constamment inspiré ses résolutions. Il n'a laissé échapper aucune des occasions qui l'autorisaient à s'expliquer avec le cabinet fédéral sur les dangers et les embarras de la situation; mais, en usant d'une entière franchise, il s'est attaché à donner à ses observations la forme la plus amicale, et il est heureux de dire qu'il a été rendu pleine justice, à Washington, aux sentiments qui l'animaient. Après avoir jusqu'à ces derniers temps conservé à ses communications avec le gouvernement fédéral le caractère d'un échange d'idées en quelque sorte confidentiel, les circonstances l'ont amené à croire que le moment était venu de tenter une démarche plus prononcée. Il lui a paru qu'après deux années d'une lutte aussi désastreuse on ne pouvait laisser passer l'époque où les rigueurs de la saison allaient peut-être forcément interrompre les opérations militaires sans s'efforcer de faire tourner ce temps d'arrêt au profit des idées de paix et de transaction.

Frankreich, 12. Jan,

Ayant toujours considéré, d'ailleurs, que le succès d'une tentative semblable était d'un intérêt général, se croyant de plus fondé, par la conformité de ses impressions sur les affaires d'Amérique avec celles des cabinets de Londres et de Saint-Pétersbourg, à leur attribuer des dispositions analogues aux siennes, le Gouvernement de l'Empereur a tenu à ne pas agir isolément. Il a donc proposé au Gouvernement russe et au Gouvernement britannique de se joindre à lui pour travailler de concert à amener une armistice de six mois entre le Gouvernement fédéral et les confédérés du Sud. La réponse des deux cours est déjà connue. Tout en témoignant qu'elles partageaient les sentiments qui nous avaient suggéré notre proposition, elles ont décliné l'entente à laquelle nous les appelions. Nous avons assurément regretté cette détermination; mais nous n'en gardons pas moins la conscience d'avoir obéi à un devoir d'humanité et de bonne politique. Nous sommes convaincus que notre proposition, présentée collectivement, aurait pu contribuer à arrêter une effusion de sang inutile et à hâter l'instant d'une réconciliation, dont nous avions d'ailleurs abandonné les termes à la libre appréciation des belligérants. Il n'y a pas lieu évidemment pour nous, aujourd'hui, de reprendre isolément l'initiative d'un projet qui, dans notre pensée primitive, devait être exécuté avec le concours de nos alliés; mais nous n'avons pas voulu laisser ignorer à Washington que nous étions tout prêts, si on nous en témoignait le désir, à faciliter, seuls ou collectivement, sous telle forme qui nous serait indiquée, l'œuvre de paix à laquelle nous avions voulu associer la Grande-Bretagne et la Russie.

1863.

No. 474. Frankreich,

1863.

Le Gouvernement de l'Empereur a eu occasion de s'expliquer, dans la 12. Jan. dernière session, sur les causes de dissidence qui, au Mexique, avaient amené l'Angleterre et l'Espagne à se séparer de la France. Malgré les discussions récentes dont ces événements ont été l'objet dans les Chambres espagnoles, nous ne croyons pas devoir rentrer ici dans des détails déjà connus. Sur tous les points le Gouvernement de l'Empereur maintient la manière de voir qu'il a exposée par l'organe des ministres de Sa Majesté devant le Sénat et le Corps législatif en s'appuyant sur des documents diplomatiques. Il suffira donc, pour le moment, de rappeler que la retraite de nos alliés avait rendu nécessaire l'envoi de renforts considérables, puisque nous allions désormais poursuivre senls une expédition commencée à trois. L'attente de ces renforts devait inévitablement entraîner des retards dans nos opérations; mais toutes les troupes parties de France ont actuellement rallié le corps expéditionnaire. Pour assurer l'unité de direction, les pouvoirs diplomatiques et militaires ont été concentrés entre les mains du commandant en chef. La saison devenue favorable ôte toute inquiétude quant à l'état sanitaire de nos braves soldats et va leur permettre de poursuivre énergiquement la guerre. La question mexicaine est ainsi entrée dans une phase toute militaire dont il n'y a qu'à attendre le dénoûment. Le Gouvernement se bornera donc à exprimer la confiance que l'expédition se terminera bientôt glorieusement pour notre drapeau, et que le moment n'est plus éloigné où le succès de nos armes assurera aux intérêts qui nous ont amenés au Mexique les garanties durables qu'ils réclament depuis si longtemps.

Nos relations, toujours aussi amicales avec le Brésil, avec le Gouvernement d'Haïti, sont moins satisfaisantes avec quelques autres États de l'Amérique du Sud, qui montrent peu d'empressement à tenir compte de nos légitimes réclamations. C'est surtout au Vénézuéla que le Gouvernement de l'Empereur a le regret de voir s'accumuler des plaintes dont l'examen équitable nous est toujours refusé. Mais nous constatons avec plaisir que nous avons rencontré de tout autres dispositions au Pérou et à Buenos Ayres.

A Montévidéo, la négociation qui était depuis si longtemps pendante a enfin abouti au règlement que nous poursuivions en commun avec la GrandeBretagne. Le payement de l'indemnité stipulée viendra soulager la misère d'un grand nombre de Français qui avaient eu à souffrir, dans l'Uruguay, de préjudices causés par des faits de guerre et qui en attendaient depuis de longues années la réparation.

Le cabinet de Lima, sous l'administration qui a précédé l'avénement à la présidence du général San-Roman, obéissant à des influences qui nous étaient hostiles, avait cherché à provoquer dans les républiques voisines des défiances contre notre expédition du Mexique. Nous ne pouvions attacher une grande importance à une agitation si peu justifiée; nous n'en avons pas moins remarqué avec plaisir l'attitude de plusieurs des États auxquels s'était adressé le Gouvernement péruvien. Le Guatemala, l'Équateur et la Confédération Argentine ont témoigné à cette occasion, d'un véritable sens politique, en se montrant indifférents aux appréhensions qu'on s'efforçait de leur inspirer et en déclinant les propositions qui leur étaient faites. Ces gouvernements ont prouvé par là qu'ils

rendaient toute justice aux sentiments de bienveillance dont la France est animée No. 474. Frankreich, à leur égard. 12. Jan.

Il a été conclu à Saïgon, entre la France, l'Espagne et l'Empire d'Annam, un Traité qui, en mettant fin à la guerre poursuivie en Cochinchine, nous a définitivement assuré la possession des provinces de Bien-Hoa, de Gia-Dinh, de Dinh-Tuong et de l'île de Poulo-Condor. Le Gouvernement de l'Empereur a la confiance que notre marine et notre commerce recueilleront de sérieux avantages de l'acquisition de cette nouvelle colonie, qui contribuera puissamment à l'extension de nos rapports avec l'extrême Orient.

En Chine, la persistance de la rébellion continue à être une source d'inquiétudes pour le commerce étranger dans les provinces du littoral où se trouvent ses plus grands intérêts et dans celles qui alimentent le commerce de la soie. La volonté du cabinet de Pékin, manifestée par des preuves récentes de donner plus de sécurité aux rapports nouveaux que les nations étrangères entretiennent avec le Céleste Empire, et de tenir la main à l'exécution des Traités, atténuera, il faut l'espérer, les conséquences fâcheuses de l'insurrection qui dévaste une partie du pays.

Il a

Il n'y a pas encore lieu de constater chez le Gouvernement japonais des dispositions aussi satisfaisantes. Il est impossible de se dissimuler que le sentiment de celle des classes de la population avec laquelle ce Gouvernement a le plus à compter est ouvertement hostile à toute relation avec le dehors. paru équitable et politique de tenir compte des difficultés intérieures avec lesquelles le cabinet de Yédo se trouve aux prises. Aussi avons-nous autorisé la mission japonaise venue à Paris dans le courant de cette année à déclarer, à son retour au Japon, que la France consentait à ajourner l'accomplissement de certaines clauses du traité, à la condition que toutes les autres stipulations recevraient une plus sérieuse et plus loyale exécution. Le Gouvernement de l'Empereur a pensé qu'une concession semblable était justifiée par les circonstances, et lui donnerait le droit d'être d'autant plus sévère ultérieurement, si le Gouvernement japonais voulait échapper aux obligations qu'il a contractées.

L'avénement à Madagascar d'un souverain désireux d'ouvrir son pays à la civilisation européenne ne pouvait être vu par la France avec indifférence. Nous nous sommes donc empressés de répondre de la manière la plus bienveillante au vœu qu'il a exprimé d'entrer en rapport avec le Gouvernement de l'Empereur. Un agent consulaire est aujourd'hui installé à Émyrne. Un traité d'amitié et de commerce a été signé récemment avec le roi Radama. Ce traité, avant d'être ratifié, appelle un examen spécial; mais il suffira de dire, pour en établir dès à présent le caractère libéral, qu'aux termes d'une de ses clauses, le bénéfice de cet acte sera acquis à toute nation qui en fera la demande, sans même qu'elle ait à conclure, pour s'en assurer les avantages, aucune convention particulière. Espérons que notre commerce saura profiter de l'accès qui lui est ouvert à Madagascar dans des conditions de sécurité qui n'existaient pas jusqu'à ce jour.

1863.

No. 474. Frankreich, 12. Jan. 1863.

AFFAIRES COMMERCIALES.

Le Gouvernement de l'Empereur a réussi, pendant l'année qui vient de s'écouler, à obtenir en Europe de nouvelles et précieuses adhésions à la politique libérale qu'ont inaugurée nos traités de commerce avec l'Angleterre et la Belgique, et qui a déjà, bien que de date récente, l'autorité d'une tradition. Les deux grandes négociations qu'annonçait l'exposé de 1861 ont abouti à des résultats qui, pour n'être pas encore complets et définitifs, n'en ont pas moins une haute importance. Les plénipotentiaires de la France et ceux de la Prusse ont constaté, le 2 août dernier, par un acte solennel, l'heureuse entente et les mutuels engagements de leurs Gouvernements respectifs. Nous sommes également parvenus à nous mettre d'accord avec l'Italie sur les bases du nouveau régime conventionnel que la transformation politique de la Péninsule a rendu nécessaire, et la signature du traité qui le consacre ne saurait se faire longtemps attendre.

L'année 1863 ne se passera donc point, il est permis de l'espérer, sans que les vœux des populations reçoivent sur les bords de la Méditerranée, comme de l'un et l'autre côté du Rhin, une entière et légitime satisfaction.

Dans les États du Zollverein, le mouvement en faveur de l'alliance commerciale avec la France se propage et se prononce de plus en plus. C'est en vain qu'il est combattu par des influences qui cherchent à substituer à la question économique des considérations d'une autre nature. La pensée et le but du traité de Berlin sont chaque jour mieux appréciés, et dans le midi même de l'Allemagne, l'industrie, mieux éclairée sur ses intérêts, plus confiante dans ses forces, sollicite aujourd'hui comme un bienfait l'exécution du contrat qu'elle repoussait naguère comme un danger. Quoi qu'il en soit, le refus d'un seul des membres de l'Union douanière suffisant pour empêcher l'exécution de l'acte négocié et conclu au nom de tous, le Gouvernement prussien s'est vu conduit à mettre les cabinets dissidents en demeure d'opter pour la ratification du traité du 2 août ou la dissolution du Zollverein au 1er janvier 1866, terme assigné à son existence, à défaut de renouvellement de sa charte constitutive. Le Gouvernement français a dû rester étranger à ces débats intérieurs; mais, tout en s'abstenant d'intervenir, il a eu soin que son langage ne laissât subsister aucun doute sur la ferme intention de maintenir intact l'ensemble des stipulations arrêtées avec la Prusse.

Les difficultés que rencontre la ratification par le Zollverein des arrangements de Berlin ont eu malheureusement pour conséquence de retarder le règlement de nos rapports commerciaux avec certains pays limitrophes de l'Union douanière, tels que les villes anséatiques et la Suisse. En effet, le Gouvernement de l'Empereur avait cru devoir subordonner à la mise en vigueur du traité franco-prussien l'ouverture de négociations nouvelles; mais aujourd'hui qu'il entrevoit le terme de la situation précaire dans laquelle une opposition mal inspirée place le commerce de la France et de l'Allemagne, il n'a plus de motifs pour se refuser à l'examen des propositions du Conseil fédéral et des Gouvernements anséatiques. Il vient donc de faire savoir à Berne et à Hambourg qu'il est prêt à ouvrir les conférences.

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